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Histoires réelles.

#1
Deux médecins opèrent à cœur ouvert à Figeac

Reconnaissance aux frères Jacques


Bien entendu lorsqu’on parle de Figeac, deux noms reviennent inlassablement, vous les avez tous en mémoire, il s’agit de Jean-François Champollion et de Charles Boyer. Aujourd’hui je tiens à vous présenter deux hommes exceptionnels. Deux personnages de l’ombre, mais dévoués cœurs et âmes à leur profession de médecin. Je vais d’abord vous parler de Monsieur Chancel car je l’ai bien connu personnellement. Il avait son cabinet dentaire boulevard Georges Juskiewenski. A peine le petit escalier en pierres sèches franchi, on se trouvait face à l’entrée où un petit couloir étroit nous dirigeait vers la salle d’attente. Confortablement installés, on pouvait à loisir lire quelques revues éparpillées sur une table basse. Depuis, ce décor sobre a peu évolué me direz-vous ! Les émanations médicamenteuses aux effluves bien connues venaient emplir alors nos narines et, comme si cela ne suffisait pas à nous rappeler que nous étions dans un cabinet dentaire, on percevait un sifflement harmonieux bien caractéristique en prémices à un petit air de douleur promis!
Rien cependant de très décourageant, notre brave praticien avait des années d’expérience derrière lui ! Une retraite bien méritée allait bientôt lui permettre de regagner sa grande propriété boisée située en Auvergne. Aussitôt dans l’enclave du cabinet, je m’installais confortablement sur le fauteuil incliné en lui disant: « Vous savez, je viens vous voir pour une douleur à une dent, cependant, je n’ai pas d’argent pour vous régler les soins !» Le serment d'Hippocrate était donc par nécessité immédiatement appliqué. Mon soignant, vêtu d’une grande blouse blanche, me mettait immédiatement en confiance en me lançant la phrase suivante :« A t-il était une seule fois question d’argent entre nous?». Tout en actionnant sa terrible roulette à l’intérieur de ma bouche qu’il maintenait grande ouverte grâce à un de ses doigts, il me parlait de ses plantations de sapins, de ses poulets et autres animaux à quatre pattes qui peuplaient son domaine. Il ne manquait pas de me causer aussi de ses consœurs qui exerçaient depuis peu dans notre vieille cité. Au passage, elles en prenaient plein les dents. Il m’avait rapporté qu’un patient était venu le consulter pour l’extraction d’une molaire. Cette dent résistante était ancrée de telle manière que nos dentistes féminines n’avaient pas réussi à la déloger d’une mâchoire qui avait fini par être meurtrie à vif ! « Heureusement que j’étais là pour achever le travail » me lança t-il ! Chirurgien dentiste c’est un métier d’homme, faut avoir de la poigne pour ne pas se manquer! Cette façon maligne qu’il avait d’entretenir une conversation qui ne pouvait aller que dans un sens détournait mon attention, ce qui me permettait de faire l’abstraction d’une douleur souvent montante pendant le soin. Il me regardait avec ses yeux vitreux et j’avais beau lever le bras pour lui signaler une vive douleur comme il avait été convenu dans notre pacte, l’engin tournant à plusieurs milliers de tours à la minute finissait sa besogne hautement curative. Je n’allais quand même pas me plaindre d’un soin qui était gratuit!

J’ouvre une petite parenthèse pour vous parler de l’époque d’avant, où l’on pouvait trouvait la mort suite à une rage de dent. Je rappelle pour les plus jeunes d’entre vous que les "arracheurs de dents" se tenaient au service de la population sur les places des villages jusqu’à la fin des années trente. Le service dentaire local se déplaçait généralement le jour de la foire aux bestiaux. Il était inutile de prendre rendez-vous, voilà pour le côté pratique. Pour couvrir les hurlements des patients, les roulements de tambour se faisaient entendre, il faut ajouter que les pinces monseigneur non stérilisées ne laissaient aucune chance aux dents creuses excessivement douloureuses et tremblantes montées sur coussin d’air ! L’expression "mentir comme un arracheur de dents " prenait alors tout son sens, car elle intervenait après ces paroles rassurantes : « Approchez-vous de moi sans crainte, avalez ce verre de gnôle, vous ne sentirez rien !» En avant la musique ! Et au suivant ! Le verbe extraire n’avait pas encore acquis ses lettres de noblesse. En parlant de noblesse et avant de refermer ma bouche sur cette parenthèse rigolote, savez-vous pourquoi l’ensemble de la bourgeoisie et de la royauté ne sourit jamais sur les peintures qui les représentent ? Trois…deux…un…zéro !Tout simplement par rapport à l’intérieur de leur bouche dans un état pitoyable ! Il va falloir que vous pensiez à édenter vos acteurs, Messieurs les réalisateurs, lorsque vous campez la royauté par exemple, sur la bande cinématographique ! Le Roi Soleil n’était pas doté d’un sourire éclatant aux émanations printanières, son ministre Jean Baptiste Colbert non plus à l’opposé du Président Macron et de sa première Ministre Elisabeth Bornée aujourd’hui ! Ah non ! Pardonnez-moi cette erreur volontaire, c’est le surnom que je lui ai donné : Je parlais naturellement de Madame Borne ! Les sans-dents d’autrefois ne faisaient pas forcément partie du pauvre peuple, comme vous le constatez. Les implants à 6000 euros la dent ne sont venus au secours des nantis que bien plus tard!
Eh oui! Pauvres hères,vous n’avez pas toujours eu à souffrir d’une différence physique avec la haute société.

Revenons aux années soixante où frère Jacques, c’est ainsi que je l’avais surnommé par apport à son prénom, était connu des pauvres gens de la région. Il prodiguait des soins sur les ratiches des malheureux sans leur demander le moindre sou. Il avait su me rassurer en me disant que j’étais doté d’une belle dentition pour l’époque, je n’ai connu la brosse à dents qu’en 1967 à mon entrée au lycée Champollion. Son diagnostic je dois le reconnaître a été excellent, je peux encore aujourd’hui mordre dans une pomme sans me soucier de la dureté du fruit. Merci, Monsieur Chancel, vous avez permis aux sans dents de ne pas se faire un sang d’encre, des praticiens comme vous j’en suis persuadé n’existe plus actuellement. Le deuxième personnage de l’ombre était médecin il s’agit de Monsieur Issaly. Ma mère , qui était infirmière à l’hôpital de Figeac, m’en avait toujours parlé comme d’un être à la bonté inégalable. Une perle dans la profession! L’argent, lui aussi oubliait de le réclamer aux indigents, mais parfois également aux personnes moyennement aisées. Une petite anecdote à son sujet m’a été rapportée dernièrement. Il s’était déplacé à plusieurs reprises chez une grand-mère en fin de vie et, fidèle à son habitude, il l’avait soignée sans rémunération. Cependant, un voisin proche de la famille marquait ses passages sur un petit carnet. La vieille dame très âgée a fini malgré ses bons soins par aller à la rencontre de Saint Pierre, du moins c’est ce que le curé a sermonné le jour de son enterrement! L’homme fit part des visites répétées du médecin à un membre de la famille d’une honnêteté exemplaire, qui se rendit en consultation chez notre bienfaiteur avec la ferme intention de lui régler les notes d’honoraires. Après la question d’usage sur l’état de sa santé, Maître Issaly eut ces mots : « Que venez vous faire ici si vous n’êtes pas souffrant ?» « Je viens régler les visites que vous avez faites chez Madame : L……..». « Je n’ai aucune idée du nombre de déplacements que j’ai pu effectuer chez cette brave personne !» «Ils sont notés ici, au nombre de six». «Je vous remercie, cher Monsieur, cependant mes soins pour cette dame ont été toujours gratuits, donc je n’accepte aucune somme la concernant». Ainsi ce brave praticien d’un autre âge exerçait son noble métier à Figeac. On pouvait le voir circuler en ville à bord de sa belle traction avant noire. Il avait ses habitudes et en bon vivant, à heure fixe, il discutait avec les habitués au comptoir de certains bars où il avait, rapporte t-on, son propre verre qui l’attendait. Comment ne pas être admiratif face à ces âmes du devoir, qui ont pratiqué la médecine avec un seul souci, le bien être des pauvres gens du peuple, avec en permanence en tête un serment que je rappelle ici : Au moment d’être admis(e) à exercer la médecine, je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité. Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux. Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. J’interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité. Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les lois de l’humanité. J’informerai les patients des décisions envisagées, de leurs raisons et de leurs conséquences.
Je ne tromperai jamais leur confiance et n’exploiterai pas le pouvoir hérité des circonstances pour forcer les consciences. Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire. Admis(e) dans l’intimité des personnes, je tairai les secrets qui me seront confiés. Reçu(e) à l’intérieur des maisons, je respecterai les secrets des foyers et ma conduite ne servira pas à corrompre les moeurs. Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies. Je ne provoquerai jamais la mort délibérément. Je préserverai l’indépendance nécessaire à l’accomplissement de ma mission. Je n’entreprendrai rien qui dépasse mes compétences. Je les entretiendrai et les perfectionnerai pour assurer au mieux les services qui me seront demandés. J’apporterai mon aide à mes confrères ainsi qu’à leurs familles dans l’adversité. Que les hommes et mes confrères m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses ; que je sois déshonoré(e) et méprisé(e) si j’y manque. Que le Divin s’il existe, se souvienne de ces deux braves Figeacois exemplaires, hélas par beaucoup aujourd’hui oubliés! Le docteur Issaly a exercé des années trente environ jusqu’à la fin des années soixante dans le même créneau que le chirurgien dentiste Chancel.

Pour moi, dans un autre registre c’est vrai, ils ont eux aussi leur place au panthéon de notre petite ville, au même titre que Jean François Champollion et Charles Boyer! Une anecdote qui confirme le dévouement de ce praticien dans l’âme m’a été rapportée par Jean. Pendant la Seconde Guerre mondiale, l’ épouse de Roger Martin du Gard un écrivain français célèbre de la première moitié du vingtième siècle, lauréat du Prix Nobel de Littérature en 1937, réfugiée avec son époux à Figeac, a elle aussi été soignée gratuitement . Dans la copie numérique de la lettre manuscrite retrouvée sur Internet Roger Martin du Gard insiste pour payer ses honoraires à un docteur humaniste ! Il y avait à l’époque de nombreux médecins altruistes et passionnés par leur métier. Pardonnez-moi, restons simples, je voulais bien entendu parler de la disposition bienveillante que possèdent certains êtres pour leur semblables ! C’ est malheureusement de plus en plus rare aujourd’hui n’est-ce pas ? Je me demande même avec anxiété s’il en existe encore.…







la vie des pensionnaires au lycée Champollion


La vie des élèves pensionnaires au Lycée Champollion dans les années soixante, dur dur ! Un petit avant-goût du service militaire pour ceux qui avaient la chance de ne pas atterrir dans les paras. Voici l’équipe de cross-country du lycée Champollion en 1969-1970. C’était déjà un peu plus cool du point de vue de la discipline. Nous avions été champions d’Académie, puis sélectionnés pour les championnats de France universitaires. Je reconnais sur la photo Pierre Roura, Chaussade et moi, déjà avec un maillot de cyclisme Peugeot sur le dos. Je devais sûrement avoir, ce jour-là, mon vélo pas très loin ! En 1967-1968 les cheveux longs étaient à la mode suite aux élucubrations d’Antoine…mais Arnal dit Couraide, Cure et Cazard préféraient que l’on ait les idées longues! À cette époque j’étais pensionnaire et il régnait au sein du lycée une discipline d’enfer, qu’il ne faut surtout pas confondre avec celle de fer, bien moins rigide ! On devait sortir en week-end cravatés et celui qui oubliait, suite à une grave inattention, de revêtir cet ornement vestimentaire était contraint à un demi-tour dès que possible! Il était gratifié de deux jours de colle entre les murs de l’établissement. En prime il se voyait interdit de sortie en ville le mercredi après-midi qui suivait ! Bien entendu, seuls les lycéens qui avaient par chance un correspondant sur Figeac pouvaient se promener en ville ce jour-là ! Le règlement rigide était truffé de conditions sine qua non ! Heureusement, pour nos parents le prix de la pension n’en était pas plus élevé ! Le lourd portail ne s’ouvrait pas sur la liberté facilement, comme vous pouvez le constater ! Le même sort guettait le pauvre collégien qui n’était pas apte à donner les dates de naissance et de décès de l’illustrissime Jean-François Champollion lorsqu’il était stoppé dans son élan bien légitime par un surveillant à une encablure du monde libre. Il était alors sanctionné sur-le-champ de deux jours de retenue afin qu’il puisse apprendre et retenir ces deux précieuses et essentielles dates relatives au premier souffle et au dernier râle du déchiffreur de hiéroglyphes.

Nous dormions au cinquième étage et c’était par un long chemin de croix que l’on regagnait nos lits. Les deux gardes de service, à peine plus âgés que nous, stoppaient notre ascension à chaque étage pendant deux à trois minutes et au moindre bruit, un pauvre pensionnaire pris au hasard dans le secteur du délit était invité à passer la fin de semaine au lycée. L’escalier débouchait sur un immense dortoir d’une soixantaine de lits, plus peut-être? Ils étaient positionnés à droite et à gauche d’une large allée. Des lavabos sans eau chaude et des toilettes apportaient un peu de confort à ce lieu de repos. Au bout de ce couloir central masqué par de larges rideaux se trouvait la piaule du jeune pion. Le dortoir 52 était celui des garçons, il me semble que les filles étaient installées au 31, il m’est difficile de me le remémorer ! Tout ceci est très loin, évidemment les lieux de sommeil n’étaient pas mixtes ! Parfois une tentative presque désespérée était au programme d’un très courageux pour rejoindre son aimée, mais hélas, le veilleur de nuit, semblable à une chauve souris agitée, se baladait dans une ronde infernale dans les sombres corridors et malheur à celui qui se faisait prendre! L’exclusion définitive du lycée était à la clé d’une telle pulsion sentimentale, le conseil de discipline ne rigolait pas avec les plus téméraires mais vous savez comme moi que l’amour est capable de nous transcender au point de nous faire oublier la peur, et puis il y avait cette montée d’adrénaline très excitante. Les sanctions pleuvaient, comme je viens de vous l’expliquer, nous en avions parfois deux ou trois en retard, c’est-à-dire qu’entre deux vacances principales, on ne voyait pratiquement jamais notre famille. Je me suis toujours demandé ce qui aurait pu se passer en cas d’incendie, les normes de sécurité étaient plus que sommaires ! Enfin, les miracles se produisent parfois, je vous en donne la preuve formelle ! Blouses grises et bleues pour les garçons, roses et je ne me souviens plus de l’autre couleur pour les filles. Bref, c’était le bon temps, comme se plaisent à dire les bien plus jeunes que nous aujourd’hui !

Être dans l’équipe de cross ou d’athlétisme nous permettait de pouvoir sortir de l’enclave du lycée au moins le mercredi lorsqu’on avait une sanction en retard. Cependant, de temps en temps, les prisonniers du week-end pouvaient prendre le chemin ô combien bucolique du Cingle ! C’était une récompense qui conduisait à une petite bouffée d’air libre, l’esprit pouvait ainsi prendre de la hauteur et rêver de jours meilleurs. Je n’ai pas le souvenir d’avoir dragué les filles dans la cour, cela me paraît étrange me connaissant, peut-être étions-nous sur nos garde encore une fois par rapport au régime disciplinaire en vigueur ! Le réfectoire était au rez-de-chaussée, les salles de classes au-dessus pour certaines, et nous savions par avance ce qui allait nous être servi à midi et le soir grâce aux odeurs qui montaient généreusement vers nous en nous chatouillant les narines ! Le jour des frites était le bienvenu, un vrai jour de fête ! La choucroute était accompagnée d’une carafe de bière, et nous avions droit à une bouteille de vin rouge pour huit élèves. Moyennant un arrangement avec les tables attenantes, j’ai pris ma première cuite au lycée! Le prof de français, qui m’avait en amitié, a eu la bonne idée de me faire lire un court passage de l’Assommoir du regretté Émile Zola! L’intuition sûrement ! Il se demanda rapidement qui était le plus assommé de l’histoire cet après-midi-là! Je n’ai pas eu à souffler dans l’alcootest, heureusement, malgré une navigation très douteuse entre les lignes!

Je me remémore le soir où j’avais été "saqué !" En d’autres termes, je n’avais plus droit qu’à une très pauvre ration du nectar tant attendu ! Nous avions un protocole bien établi. Nous faisions tourner un verre et celui qui se trouvait en face de l’ouverture était la victime désignée de la soirée. Ce jour-là, le verre en question s’était positionné entre moi et un autre pensionnaire. Logiquement on aurait dû rejouer la partie entre nous deux! Ce ne fut pas le cas et le litige tourna en ma défaveur suite à une mauvaise foi évidente. Face à cette flagrante injustice, j’ai raclé le fond du plat et j’ai réussi à remplir une cuillère de fromage blanc fouetté que j’ai expédié sur la tronche de celui qui avait refusé d’admettre l’évidence. C’est à cet instant précis que j’ai senti une main se poser sur mon épaule. C’était celle du surveillant général Arnal que l’on surnommait Couraide ! Il donnait l’impression de déambuler avec sa tête solidement fixée à un balai au dos de sa vieille carcasse! Sans hésiter, il prononça ces saintes paroles : « Marcouly, tu resteras avec nous ce week-end !»
Depuis, j’éprouve une certaine réticence à déguster du fromage blanc fouetté ! Ce réfectoire servait également de permanence, je me remémore la capture des grosses mouches. Grâce à un fil d’une blouse et à une gestuelle parfaite, on arrivait à attacher un minuscule bout de papier à une de leurs pattes et on les libérait ainsi…Vous avouerez qu’il en fallait peu pour nous faire rire! Une barre de chocolat noir à cinq heures et un morceau de pain, et nous montions en étude pour deux heures studieuses dans un calme encore surprenant.

Voilà, pour résumer sommairement, la vie des lycéens à "Champo", cela nous donnait un petit avant-goût d’armée ! Je suppose qu’aujourd’hui nos enfants ne connaissent pas cette sévérité. Mais peut-être avez-vous des bons souvenirs, aussi, à vos plumes ! Allez, un dernier souvenir ! Un pion particulièrement doué en 1967 ( 4 licences en poche), qui avait élu domicile dans le camping municipal, a posé cette question osée au Principal lors de son recrutement : « Les dortoirs sont-ils mixtes ? » Un soir où nous étions à l’étude avec lui et où, pour une fois, il y avait beaucoup d’agitation, Cure, alerté par le bruit, pointa rapidement le bout de son nez à la porte : «Que se passe-t-il ici ?» Le pion, sans se démonter une seconde, lui rétorqua : « Rien, j’étais simplement en train de leur faire un cours d’espagnol en anglais !» Nos rires résonnent sûrement encore dans la salle d’étude n°113 !

Une dernière petite anecdote me revient. Lorsque j’ai mis les pieds pour la première fois dans l’enclave du lycée au mois de septembre 1967, j’avais en tête, en milieu de semaine, de pouvoir assister aux fiançailles de mon frère aîné. Hélas, n’ayant pas prévu d’amener un mot spécifiant que je sortirais le samedi, alors que la rentrée scolaire avait eu lieu en cours de semaine, je n’ai pas pu assister à cette fête familiale. Mon frère est pourtant venu pour essayer de me libérer mais, après son intervention, le surveillant général Cure, un psychorigide sans égal, a simplement dit en me regardant : « Mon pauvre ami, il fallait que tu aies cette autorisation en poche en temps voulu , tu resteras donc avec nous dimanche ! C’est ainsi que j’ai commencé ma cure au lycée, et croyez-moi, je n’en avais cure! Voici, pour terminer, deux témoignages d’élèves suite à mon écrit : Pour les filles, blouses roses et bleu clair. Demi-pensionnaire, il fallait montrer une serviette de table propre le lundi et pour nous, en 67, il y avait des barrières dans la cour pour séparer les filles des garçons ! L’Education nationale, vous le voyez, ne prenait absolument aucun risque !